expreso del hielo el yetiRien ne semble entamer l'enthousiasme de ce garçon jovial . Pas même une sale blessure à l'oeil qui l'a forcé à quitter ses potes plusieurs jours. Il faut dire que « Coco » est, avec Cathy Benainous , l'instigateur de cette folle équipée . Bricolo de génie , il tenait 14 rôles, dont celui de Napoléon , dans « La Véritable Histoire de France », spectacle de rue époustouflant du groupe Royal de luxe , qui sillonna l'an dernier les côtes sud-américaines à bord du fameux Cargo . Pendant son périple colombien , Coco trouva des rails partout sans jamais voir de train . De quoi intriguer ce fana des chemins de fer. « Gamin d' Aubervilliers , je cavalais à Pantin pour contempler le défilé incessant des convois vers des destinations inconnues . La magie du voyage et de l'évasion .» Il découvre que Ferrovias , propriétaire des voies , concocte un plan de réhabilitation . Commencée dès 1903 , la liaison Bogota - Santa Marta ne fut terminée qu'en 1962 , grâce à la récupération d'une ligne texane désaffectée . Coco devine que, en réutilisant la colonne vertébrale du pays , il tient la clef d'une vraie rencontre avec les Colombiens . L'Expreso del hielo remplacera , six semaines seulement, les trois express aujourd'hui disparus: del Sol (du Soleil ), del Palito (du Petit Bois ) et del Tayrona , du nom d'une ancienne tribu indienne . Mieux, ce sera un train magique unissant des éléments contraires , le feu et la glace . Un musée d'objets givrés par un ingénieux système d'eau glycolée , refroidie par 35 moteurs de frigos ramassés sur des décharges , un wagon isotherme qui, en s'ouvrant, crache de la neige (le Yeti ), et un wagon de tôle calcinée en flammes ... Le projet emballe Denis Vene , premier secrétaire de l'ambassade de France à Bogota , et Jean Digne , directeur de l' AFAA ( Action française d'action artistique ). Des entreprises apportent un soutien financier ou logistique : Renault, dont le slogan est « La voiture pour la Colombie », les trois sociétés publiques issues des chemins de fer nationaux : Ferrovias , STF et FPS , le quotidien « El Espectador »... Le budget initial , évalué à 6 millions de francs, est bientôt réduit d'un tiers . Et, aujourd'hui, il manque encore un bon demi-million. Résultat: les artistes et les techniciens à bord (une cinquantaine ) doivent renoncer à tout salaire et se contenter d'un maigre défraiement quotidien de 7 500 pesos (à peine 58 francs!). Pressentis , la famille Buratini et les Plasticiens volants ont déclaré forfait . Quatre membres de la Mano negra sont rentrés à Paris au bout d'une semaine . Le chanteur Manu Tchao et ses musiciens ne partagent plus les mêmes motivations : l'un ne rêve que de « boeufs », les autres aspirent à des concerts aboutis . La sortie de leur prochain disque , en janvier , risque de ne pas suffire à recoller les morceaux . Les French Lovers ,eux, ont tenu bon, avec un rock simple et efficace . Des passagers clandestins sont montés en cours de route rejoindre cette équipe de forains rasés et tatoués : un pêcheur du lac Léman en vacances , un petit Noir de 12 ans, vite surnommé « Rondelle », dont le talent scénique inné impressionnerait même Quincy Jones . La moitié des Colombiens affichent moins de 20 ans. Chaque jour, des ribambelles de gosses se jettent sur les jeux installés autour du train: baby-foot , lancer d'oeufs... Le wagon de tatouage , tenu par Daniel , un Belge émigré à Bogota depuis une dizaine d'années , ne désemplit pas. Un soir, un homme a déposé son arme sur la table et demandé qu'il lui grave un Botero sur le bras. Mais Daniel n'avait pas de modèle ... Entre le raffut des moteurs des machines à glace et les bouffées chaloupées de vallenato ( chant, accordéon et tambours ), l' Expreso del hielo ravit aussi les vendeurs d'empanadas , de jus de fruits frais et de chicha ( alcool de blé fermenté ). Ils rêvent que de nouveaux voyageurs descendent bientôt à Gamarra . Mais ça, c'est une autre histoire ... code pour embarquer la vidéo : >>> http://www.youtube.com/embed/eVqq6H2R0m0 <<< |